vendredi 17 avril 2015

Improbable horizon, de Françoise Ruban







L'Océan là devant moi
Dans son infinie nappe turquoise
Au sourire de notes marines
Le silence étourdissant
  dépose une cantate

  caresse mon âme brûlante
Quelques voiles gonflent et glissent
     doucement
      délicieusement
          amoureusement

Mes rêves passagers clandestins
Embarquent
Vers un appel
   venu de loin
         au-delà
           de l'horizon
Autre galaxie
Là-bas
Au bout de la ligne droite

Les goélands taisent leurs cris
Ailes ouvertes
Immobilité planante
Malicieux compagnons de voyage
Ils savent
Et leurs clins d'oeil complices
Eclairent le sillon à peine creusé
Ils dansent sur un scénario
Ecrit cette nuit
     Ballet musical
     Voluptueux

A peine quelques échos
Rumeurs sourdes
Le port de pêche vaste chantier
Où gisent sur cales les chalutiers géants
Monstrueux insectes aux hélices rouillées
Aux coques béantes
Echoués
Inertes
Sur le bitume stérile

De plus loin encore
               montent
                       des relents calcinés
Peste
Brune
Mortifère
Assassine
Cris surgis
  d'un passé endormi
       souterrain cauchemar
 Années torturées
Hurlant la Mort
Loups assoiffés
Chairs éclatées
   en un chaos
          ensanglanté

L'Océan là devant moi
M'ouvre sa nappe turquoise
Son sourire de notes marine...

Rejoindre la magie du rêve
Fuir vers cet Ailleurs aux horizons lointains aux rivages incertains
       Au-delà
             de la Mer éternelle
Pénétrer le Mystère
      Auréolé
       de
     Bleu

©   F.R
le 03 mai 2012

in, L'Âme des marées
recueil paru en octobre 2014
éditions épingle à nourrice
http://editozap.jimdo.com/livres/


crédit photos fruban

mardi 14 avril 2015

Tu es plus belle que le ciel et la mer, de Blaise Cendrars

Tu es plus belle que le ciel et la mer
Quand tu aimes il faut partir
Quitte ta femme quitte ton enfant
Quitte ton ami quitte ton amie
Quitte ton amante quitte ton amant
Quand tu aimes il faut partir
Le monde est plein de nègres et de négresses
Des femmes des hommes des hommes des femmes
Regarde les beaux magasins
Ce fiacre cet homme cette femme ce fiacre
Et toutes les belles marchandises
II y a l’air il y a le vent
Les montagnes l’eau le ciel la terre
Les enfants les animaux
Les plantes et le charbon de terre
Apprends à vendre à acheter à revendre
Donne prends donne prends
Quand tu aimes il faut savoir
Chanter courir manger boire
Siffler
Et apprendre à travailler
Quand tu aimes il faut partir
Ne larmoie pas en souriant
Ne te niche pas entre deux seins
Respire marche pars va-t’en
Je prends mon bain et je regarde
Je vois la bouche que je connais
La main la jambe l’œil
Je prends mon bain et je regarde
Le monde entier est toujours là
La vie pleine de choses surprenantes
Je sors de la pharmacie
Je descends juste de la bascule
Je pèse mes 80 kilos
Je t’aime

Blaise Cendrars,
 Feuilles de route, 1924