vendredi 12 octobre 2018

Walid Alswairki, poète palestinien












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Publié le 28 Juillet 2015 par la courte échelle. éditions transit in Salons et fêtes du livre








LE TEMPS BLEU


Littérature


http://lintula94.blogspot.com/




Walid Alswairki, poète et traducteur, est né en 1967 à Jeftlek en Palestine. Il passe son enfance et sa jeunesse dans un camp de réfugiés palestinien au nord de la Jordanie. On le retrouve plus tard à l'Université de Yarmouk de ce pays, où il étudie la littérature française puis à l'Université de Franche-Comté, où il prépare un diplôme de littérature comparée. Matière qu'il enseigne par la suite, à l'Université de Yarmouk, avant de rejoindre l'ambassade de France à Amman, en tant qu'attaché de presse.

Il a publié un recueil de poèmes, Ailes blanches du désespoir, en 2006.


J'ai beaucoup aimé son Ultime escalier, qui figure dans l'Anthologie Sète (2015), éditions Bruno Doucey (ci-dessous)


          Ultime escalier


         Il suffit d'un grand arbre

         Pour que je fixe longuement le soleil


         Il suffit d'une herbe brisée

         Pour que j'avance dans le vent


         Il suffit d'une grande plaine pour que

         L'âme escalade cette montagne


         Il suffit de deux mains amoureuses

         Pour que je descende,

         Paisible comme un ruisseau,

         Le petit escalier de ma mort.

                        traduit de l'arabe par l'auteur


         in Voix vives de méditerranée en méditerranée, Anthologie Sète 2015, éditions Bruno Doucey,

         2015, p.154.


D'une belle fluidité, ce poème reprend les thèmes chers à Mahmoud Darwich et à la poésie arabe en général : l'arbre, l'herbe, le vent, l'eau, l'amour. Survient la chute, bouleversante: "il suffit de deux mains amoureuses pour que je descende, paisible comme un ruisseau, le petit escalier de ma mort ".

Le lecteur, en suspens sur la marche, est confronté soudain à sa propre mort...Cette trouvaille est la marque d'un grand poète.


Mahmoud Darwich, dans son entretien accordé au Nouvel Observateur, en février 2006, ajoutait :

          La poésie a la fragilité de l'herbe. L'herbe paraît si vulnérable, mais il suffit d'un peu d'eau et

         d'un rayon de soleil pour qu'elle repousse.


 Bashir Shalash et Walid Alswairki assurent la relève en faisant, tels leur maitre, chanter la beauté dans un pays, où elle a été mutilée, saccagée et où l'on vit en deçà de la vie.

Découvrons-les et faisons-les découvrir.


Bibliographie:

Le lanceur de dés et autres poèmes, Actes Sud 2009

La terre nous est étroite, Poésie/Gallimard 2000

Voix Vives de méditerranée en méditerranée, Anthologie Sète 2015, éditions Bruno Doucey 2015








Ecoutez jusqu'au bout pour entendre aussi la traduction


Vous pouvez retrouver Walid Alswairki sur facebook


mercredi 10 octobre 2018

René Char, Fureur et mystère




Tu as bien fait de partir Arthur Rimbaud





René Char
photo du Net







Tu as bien fait de partir Arthur Rimbaud...
Tes dix-huit ans réfractaires à l’amitié, à la malveillance, à la sottise des poètes de Paris ainsi qu’au ronronnement d’abeille stérile de ta famille ardennaise un peu folle, tu as bien fait de les éparpiller aux vents du large,
de les jeter sous le couteau de leur précoce guillotine.
Tu as eu raison d’abandonner le boulevard des paresseux, les estaminets des pisse-lyres, pour l’enfer des bêtes, pour le commerce des rusés et le bonjour des simples.
Cet élan absurde du corps et de l’âme, ce boulet de canon qui atteint sa cible en la faisant éclater, oui, c’est bien là la vie d’un homme !
On ne peut pas, au sortir de l’enfance, indéfiniment étrangler son prochain.
Si les volcans changent peu de place, leur lave parcourt le grand vide du monde et lui apporte des vertus qui chantent dans ses plaies.
Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud ! Nous sommes quelques-uns à croire sans preuve le bonheur possible avec toi.

René Char, in Fureur et mystère, 1962









Rimbaud par Ernest Pignon Ernest
photo du Net