samedi 8 septembre 2018

Pedro Salinas, La voix qui t'est due (extrait)




Pardonne-moi d'aller ainsi te cherchant
si maladroitement,
en toi-même.
Pardonne-moi la douleur, parfois.
C'est que je veux tirer
de toi ton meilleur toi.
Celui que tu n'as pas vu et que je vois,
ce nageur, très précieux de tes profondeurs.
Et l'attraper
et le tenir dressé vers le ciel
comme l'arbre retient la dernière lumière
qu'il a trouvée dans le soleil.
Et alors toi
tu viendrais le chercher, là-haut.
Pour parvenir à lui
haussée sur toi-même, comme je t'aime,
ne touchant désormais ton passé
que des pointes roses de tes pieds,
tout le corps tendu,t'élevant désormais
de toi à toi-même.

Et que réponde alors à mon amour
la créature neuve que tu étais.

trad Bernard Sesé




Perdóname por ir así buscándote
tan torpemente, dentro
de ti.
Perdóname el dolor, alguna vez.
Es que quiero sacar
de ti tu mejor tú.
Ese que no te viste y que yo veo,
nadador por tu fondo, preciosísimo.
Y cogerlo
y tenerlo yo en alto como tiene
el árbol la luz última
que le ha encontrado al sol.
Y entonces tú
en su busca vendrías, a lo alto.
Para llegar a él
subida sobre ti, como te quiero,
tocando ya tan sólo a tu pasado
con las puntas rosadas de tus pies,
en tensión todo el cuerpo, ya ascendiendo
de ti a ti misma.
Y que a mi amor entonces le conteste
la nueva criatura que tú eras.

Pedro Salinas, en «La voz a ti debida»




édition bilingue le calligraphe

prologue Jorge Guillén






Pedro Salinas (1891-1951)