samedi 16 septembre 2017

Quand pointe l'Equinoxe, poème de F.Ruban

Nous marchons en ce monde
sur le toit de l'enfer
en regardant les fleurs

Kobayashi Issa




Quand pointe l'Equinoxe



Ce n'est pas encore l'Automne flamboyant
Pas la moindre feuille jaunie
Ma jungle a gardé sa robe verte
Seuls les vents et la pluie gifflent ma peau
encore salée par les embruns
Le soleil timide retient ses rayons
Quelques colchiques s'attardent
Les hirondelles ont fui
Te lire au tout petit jour
Regard tourné vers hier


Du monde remontent des relents pestilentiels
Réfugiés rejetés à la mer
chassés de nos frontières méprisés assassinés
Les pays riches se partagent d'opulentes et insolentes fortunes
Le droit d'asile la compassion humaine
n'existent plus chez nous
Accueillir la misère est devenu indécent illégal
Que te dire à toi qui toujours a vécu auprès des déshérités



Au couchant les ciels de septembre sont peut-être
les plus colorés dans leur tourmente
Ils nous offrent leur lumière de bleu de gris de feu
Leurs formes mouvantes embrasent les paysages
de leurs flammes si caressantes
Alors je me plais à croire que la paix est possible
Je sais que toi aussi tu restes là à les contempler
Bientôt la nuit nous ouvrira ses portes



© fruban, 15 septembre 2017

Tous droits réservés
recueil en cours





photo fruban


vendredi 15 septembre 2017

Tu tiens la brume dans tes mains, poème




Tu es là papillon de jour papillon de nuit
corbac noir de l'Ardenne
Tu es là à l'ombre du gingko
regard tourné vers le ciel d'automne
Nous nous croisons sur le Vieux Pont sur les rives océanes
le long d'un canal perdu
Je te vois une plume à la main
quand les mots jaillissent comme perles
quand les mots se taisent
Tu es là encore le jour
où tu tiens la brume dans tes mains
Tu es là à l'aube au crépuscule
au cœur de la nuit
Je te vois ce jour je te vois demain
sous le soleil sous la neige sous la pluie et le vent
J'entends ton cœur tendre et malicieux
ton cœur en larmes en cris de colère


© fruban

le 13 septembre 2017

Tous droits réservés
recueil en cours





photo fruban


mardi 12 septembre 2017

Anaïs Nin explique pourquoi elle écrit




Un écrivain demandait à Anaïs Nin : « Pourquoi écrit-on ? » Elle lui écrivit en réponse une lettre, qu’elle recopia dans son Journal de février 1954 :



«  Pourquoi on écrit est une question à laquelle je peux répondre facilement, me l’étant si souvent posée à moi-même. Je crois que l’on écrit parce que l’on doit se créer un monde dans lequel on puisse vivre. Je ne pouvais vivre dans aucun des mondes qui m‘étaient proposés : le monde de mes parents, le monde de Henry Miller,  le mode de Rango,  ou le monde de la guerre. J’ai dû créer un monde pour moi, comme un climat, un pays, une atmosphère, où je puisse respirer, régner et me récréer lorsque j’étais détruite par la vie. Voilà, je crois, la raison, de tout œuvre d’art. L’artiste est le seul qui sache que le monde est une création subjective, qu’il faut opérer un choix, une sélection des éléments. C’est une concrétisation, une incarnation de son monde intérieur. Et puis il espère y attirer d’autres êtres, il espère imposer cette vision particulière et la partager avec d’autres. Même si la seconde étape n’est pas atteinte, l’artiste, néanmoins, continue vaillamment. Les rares moments de communion avec le monde en valent la peine, car c’est un monde pour les autres, un héritage pour les autres, un don aux autres, en définitive. Lorsque l’on crée un monde tolérable pour soi-même, on crée un monde tolérable pour les autres.

Nous écrivons aussi pour aviver notre perception de la vie, nous écrivons pour charmer, enchanter et consoler les autres, nous écrivons pour donner une sérénade aux êtres qui nous sont chers.

Nous écrivons pour goûter la vie deux fois, sur le moment et après coup. Nous écrivons, comme Proust, pour la rendre éternelle, et pour nous persuader qu’elle est éternelle. Nous écrivons afin de pouvoir transcender notre vie, aller au-delà. Nous écrivons pour nous apprendre à parler avec les autres, pour consigner le voyage à travers le labyrinthe, nous écrivons pour élargir notre univers, lorsque nous nous sentons étranglés, gênés, seuls. Nous écrivons comme les oiseaux chantent. Comme les peuples primitifs dansent leurs rituels. Si vous ne respirez pas à travers l’écriture, si vous ne pleurez pas en écrivant, ou ne chantez pas, alors, n’écrivez pas. Parce que notre culture n’a que faire de tout cela. Lorsque je n’écris pas, je sens mon univers rétrécir. Je me sens en prison. Je sens que je perds mon feu, ma couleur. Ce devrait être une nécessité, comme la mer a besoin de se soulever. J’appelle cela respirer. »

Anaïs Nin




Vidéo publiée par Actualitté



En 1974, pour la radio KPFK 90.7 FM de Los Angeles, elle lit une de ses lettres dans laquelle elle répondait à la question « Pourquoi écrire ? ».


Anaïs Nin, photo du Net