vendredi 18 août 2017

Dérive n'est pas naufrage, poème fruban

                                               




Dérive n'est pas naufrage



"Ceux qui s'aiment et qui sont séparés peuvent vivre dans la douleur, mais ce n'est pas le désespoir : ils savent que l'amour existe".
Albert Camus, La Mer au plus près 
in, L'Eté - 1954)




Comment marcher dans ce jardin
Où tu n'es plus
Comment m'asseoir sur ce banc
Où tu ne me rejoins plus
Comment regarder ces fleurs
Que j'aimais cueillir pour toi
Comment caresser ma belle noire
Que pour rire tu avais surnommée Nougatine
Tout ce que je vois ici me semble étranger


Comment boire une bière dans la douceur de l'été
Sans toi elle n'aura plus la même saveur
Gorge serrée larmes sèches au fond du cœur
Regrets de ce que nous avons dit
Regrets de ce que nous avons tu
Regrets pour ces mots rebelles
Regrets pour ces fuites en avant
De violence en silences d'impatience en déferlantes
Notre barque a chaviré


Se savoir unique se croire simple passante
Se voir belle dans le miroir d'un regard tendre
Se fuir laide loin de ton sourire malicieux
Il a suffi qu'une dérive d'un soir déverse
Ses flots remplis de fiel amer
Pour que le monde n'ait plus de sens
Comment effacer comment retrouver
Comment te dire comment poursuivre
Notre chemin que je sais éternel


Peur de te parler désormais
Peur de ne plus savoir t'aimer
Peur de te perdre
Peur de me perdre
Peur de cet Amour qui me posséde
Peur de notre sensibilité à fleur de peau
Peur de ce trouble qui m'envahit quand je te vois
Peur de ne plus avoir le temps
Peur de toutes ces nuits blanches loin de toi


Comment au tout petit jour m'éveiller
Sans le souffle de tes baisers doux ou fougueux
Comment affronter l'heure suivante
Quand je ne sais où diriger mes pas
Et pourtant les mots sont là me brûlent les lèvres
Oserai-je les murmurer puis les crier ici
Quand je ne veux que les glisser au creux de ton sommeil
Oui je t'aime je n'aime que Toi
Notre éternité est là.


        © fruban

             quelques jours, quelques nuits en août 2017

Tous droits réservés
recueil en cours




Nouka dite Nougatine
photo fruban


mercredi 16 août 2017

Ami, poème de fruban





Ami
tant d'années de vie
d'instants de joies partagées
homme des terres brunes
tu m'as offert l'Océan et ses dunes
Ami
nos blessures nos déchirures
nos deuils inconsolables
nos chagrins impénétrables
si seuls nous emportèrent
sous le souffle de vents contraires
Ami
à jamais ta droiture ta fidélité
guident mes pas parfois chancelants
écartent les ronces et les épines du temps
sur les sentiers blessés
de mon coeur inconsolé


© fruban, texte et photo
août 2013



photo fruban


mardi 15 août 2017

Lettre d'adieu de Stieg Larsson à sa compagne Eva Gabrielsson





Stieg Larsson, photo du Net






Le 9 février 1977, Stockholm

Eva, mon amour,

C’est fini. D’une façon ou d’une autre, tout a une fin. Tout se termine un jour ou l’autre. C’est peut-être l’une des vérités les plus fascinantes que nous connaissions à propos de l’univers tout entier. Les étoiles meurent, les galaxies meurent, les planètes meurent. Et les gens meurent aussi. Je n’ai jamais été croyant, mais le jour où j’ai commencé à m’intéresser à l’astronomie, je pense que j’ai abandonné ce qui restait de ma peur de la mort. J’avais compris que, comparé à l’univers, un être humain, un seul être humain, moi… est infiniment petit. Enfin, je n’écris pas cette lettre pour donner une profonde leçon de philosophie ou de religion. Je l’écris pour te dire « adieu ». Je viens de raccrocher le téléphone où je te parlais. Je peux toujours entendre le son de ta voix. Je t’imagine, devant mes yeux… une belle image, un ravissant souvenir que je garderai jusqu’à la fin. A ce moment précis, en lisant ma lettre, tu sais que je suis mort.

Je veux que tu saches certaines choses. Comme je m’en vais pour l’Afrique, je sais ce qui m’attend. J’ai même le sentiment que ce voyage pourrait bien me tuer, mais c’est quelque chose que je dois faire, malgré tout. Je ne suis pas né pour rester assis sur un accoudoir. Je ne suis pas comme ça. Correction : je n’étais pas comme ça… Je ne vais pas en Afrique seulement en tant que journaliste, j’y vais surtout dans un but politique, et c’est pourquoi je pense que ce voyage pourrait causer ma mort.

C’est la première fois que je t’écris en sachant exactement quoi dire : je t’aime, je t’aime, je t’aime, je t’aime. Je veux que tu le saches. Je veux que tu saches que je t’aime plus que je n’ai jamais aimé personne. Je veux que tu saches que je dis ça très sérieusement. Je veux que tu te souviennes de moi mais que tu ne me pleures pas. Si je suis vraiment important pour toi, et je sais que je le suis, tu souffriras probablement en apprenant que je suis mort. Mais si je suis vraiment important pour toi, ne souffre pas, je ne veux pas que tu souffres. Ne m’oublie pas, mais continue à vivre. Vis ta vie. Le temps atténuera la douleur, même si c’est dur de l’imaginer maintenant. Vis en paix, mon plus cher amour ; vis, aime, hais, et continue le combat…

J’avais beaucoup de défauts, je sais, mais aussi quelques bonnes qualités également, je l’espère. Mais toi, Eva, tu m’inspires tellement d’amour que je n’ai jamais été capable de te l’exprimer…

Redresse-toi, carre tes épaules, tiens ta tête haute. D’accord ? Prends soin de toi, Eva. Va prendre une tasse de café. C’est fini. Merci pour les moments magnifiques passés ensemble. Tu m’as rendu très heureux. Adieu [en français dans le texte].

Je te dis au-revoir Eva, je t’embrasse

De Stieg, avec mon amour.


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