vendredi 24 mars 2017

Ode à la jeunesse, par Cristian Ronsmans



Ode à la jeunesse


C’est à la jeunesse de fonder aujourd’hui sa propre histoire, loin des idéologies. Fonder sa légende et inscrire ses utopies dans le marbre de l’Histoire.
C’est la jeunesse, nouvelle maturité, qui va balayer les vieilles lunes, les vieilles figures tutélaires. Dieu est mort ! De Gaulle aussi !
Les statues de commandeur ne sont plus que des statues !!
Aujourd’hui dans ce monde qui dépasse les « politiques qui ont de l’expérience » ces vieilles statues sont les béquilles des vieilles badernes, retranchées dans leur forteresse où ils poursuivent et fomentent, encore et toujours, l’art de cultiver les divisions, l’affrontement des contraires.
Fond de commerce des deux camps, l’affrontement des contraires, des oppositions est entretenu, dans une complicité tacite où chacun y trouve son compte. Où chacun cultive l’entre soi, au mépris du reste de l’humanité.
Aujourd’hui cette société qui a définitivement perdu la main, qui n’a pas su intellectuellement, moralement et spirituellement entreprendre sa reconversion, faire son aggiornamento en paye le prix. Celui de sa disparition ! C’est la circularité en spirale du Temps.
La jeunesse a su, par d’autres moyens, dans un progressisme constant à tous niveaux, lentement mais sûrement, asseoir sa présence désormais incontournable et sa forte parole.
Mais qu’on ne s’y trompe pas. Il ne s’agit de cette jeunesse à l’ancienne qui, à son corps défendant, faisait le jeu des bonnes vieilles politiques.
Cette jeunesse n’a plus rien à voir avec les antiques affrontements estudiantins, motivés exclusivement par les clivages sempiternels qui faisaient le bonheur des veilles badernes de l’époque.
Non ce temps est « révolu » ! Au sens « révolutionnaire ».
La jeunesse d’aujourd’hui est totalement mûre pour mener la vraie révolution culturelle attendue. Une nouvelle révolution cognitive pour une aube nouvelle.
Mais là aussi, ne nous y trompons pas, Che Guevara aussi est mort, Castro itou.
Toutes ces révolutions sont « révolues » !!
La jeunesse d’aujourd’hui ne tombera pas dans le piège du renversement de la table, de la mise à mort du ou des systèmes, avec pour ambition, comme les antiques révolutions de mettre en place son propre système, avec tous ses attributs (idéologie, nomenklatura, etc…).
Non ! Elle ne tombera pas dans ce piège mesquin, hypocrite et imbécile qui consiste à vouloir renverser un pouvoir honni pour lui substituer le sien, aux intentions masquées dans sa première période et qui se mute comme la chrysalide en système totalitaire dans sa phase de maturité.
La « révolution » ici est celle à la manière copernicienne, qui consiste à inverser le regard.
Cette révolution est une subversion du regard. Le moyen que la jeunesse se donne de sortir de la politique des politiques, par la politique.
La subversion du regard consiste à embrasser la totalité et de celle-ci dans une politique de l’entendement de créer une dialectique qui englobe toutes les parties horizontales dans l’entendement de leur particularité. .
La jeunesse d’aujourd’hui comprend enfin qu’il y a une « action » qui relève de la systémique avec la politique de l’entendement de toutes les parties et qu’alors, alors seulement, cette politique de l’entendement pourra ensemencer une politique de la raison. Une politique de la Raison est celle du Logos. De la Parole. Celle qui racontera plus tard, beaucoup plus tard, l’histoire de cette extraordinaire aventure de la politique de l’entendement.
La jeunesse d’aujourd’hui est en mesure de créer de nouveaux mythes et construire une coopération, prélude indispensable, à l’objectif final d’amour, de solidarité et de fraternité.
C’est à une immense aventure que nous convoque notre jeunesse. Une aventure qui nous dépasse et moi en premier.
Je crois cependant qu’il est des sociétés, des peuples qui plus que tout autre et ils l’ont montré tout au long de leur histoire que l’aventure était leur étendard et leur fierté.
Au pays du Vendée Globe, au pays de ceux et celles qui admirent et aiment ses grands aventuriers, comment pourraient-ils résister à cet immense défi sans se renier ?
Je sais que l’influence des temps anciens qui est, en ce moment même, arrivée à son terminus, tente encore son va tout dans cette incantatoire incantation : « Mais où allons-nous ? Quel objectif ? Ils sont bien incapables de le dire ».
Je ne crois pas que ce soit une bonne question car elle est forcément avec ou sans réponse, celle qui dit déjà : « Non !!! ».
L’objectif est important, certes, mais quel qu’il soit, c’est le chemin qui compte. Tous les aventuriers savent cela : « L’important n’est jamais le but, mais le chemin parcouru ».

© Cristian Ronsmans

le 23 mars 2017




J'ai souvent parlé ici de Cristian Ronsmans, écrivain à la plume tantôt malicieuse, humoristique, tantôt grave, comme dans cette Ode à la jeunesse.
Cristian est avant tout un ami, toujours attentif à ce que j'écris, principal lecteur de mes poèmes. (FR)




mercredi 22 mars 2017

Ephémère éclipse à coeurs croisés





Ephémère éclipse
              à cœurs croisés



Le tout petit jour arrive et découvre le lointain
Je ne sais ce qui se cache derrière le voile noir de la nuit


Nacre rose en boutons le magnolia se déploie
L'or jonquille éclabousse un matin cendré
Ce printemps n'en finit pas de se préparer
Le manque de toi
Les échos d'Istanbul
Paralysent l'ivresse du renouveau


Je compterai les jours les heures les minutes
les secondes d'éternité
L'absence et le silence des mots ne sont rien
Mon souffle est dans la tendresse de nos cœurs
L'aube est là ses lumières annonciatrices d'une belle journée
Les jonquilles vont se régaler


On me dit le vent vif annonce la venue de la semaine sainte
Toujours froide et maussade
Le merle siffleur continue ses appels moqueurs
Je le crois amoureux
Et moi je me moque du calendrier religieux
Ce soir encore les éoliennes clignotent rouge


Le tout petit jour arrive et découvre le lointain
Je ne sais ce qui se cache derrière le voile noir de la nuit





 ©fruban

le 18 mars 2017



photos fruban


dimanche 19 mars 2017

Trop d'ailes, poème de Loran

photo Loran



Trop d'ailes

J'ai appris si tôt dans mon enfance,
ce pas en retrait de moi même,
pour me regarder,
pour me prendre dans mes propres bras
et tutoyer l'autistique frontière,
que parfois le monde où je gravite,
ce monde dans lequel je vis
n'a plus aucune prise...
aucun sens,

aucun intérêt...
Je me soustrais,
me dérobe,
me dégravite...
Je suis un électron libre.

Quelle heure est elle ?
Maison smoke de l'heure...
Le temps s'est cool de mes yeux,
s'inspire de mes narines
Le temps perd son temps à repeindre mes cheveux...
Quel temps fut-il ?
Je suis un photon, ici et là en même temps,
sans y être
tout en y étant pourtant...
Je suis vide et creux
débordant de cet amour
dont jeune puits me remplir...
Mon coeur saigne
de cet amour en trop peu
dont je déborde pour te noyer
me noyer.
Tu m'es si vitale, si nécessaire toute entière
que sans plénitude de toi
je choisis le vide.

Mais quelle heure est elle ?

Quel temps fait il ?
Comme un enfant placard enfin libre
je troque ma liberté psychotique,
sur la pointe des pieds,
un pied de nez dans une main
et dans l'autre une rose,
le regard facétieux et l'âme désinvolte
qui de nouveau
se désélectrise et puis

s'épuise de l'Autre...

Comme on s'emparfume d'une fleur
je m'ensommeille de toi
dans le froissement soyeux d'une étoffe légère.
Une brise marine te déposa,
papillonne surprise,
au bord de mon âme éffarée... puis te voila
paisiblement endormie contre mon coeur,
ta peau carressant la mienne à la mesure de ton souffle.
Si d'aventure je me languis de toi,
divine psyché,
je ferme les yeux et t'hologrammise
à tendre la main.
Et je tais mes silences
au son de tes couleurs de rêves.

Loran (février 2010)


le blog de Loran, Lézardes et murmures

L'Eternité à Lourmarin, par René Char



Camus et Char
Albert Camus et René Char chez ce dernier à L'Isle-sur-la-Sorgue près d'Avignon 






Texte écrit par René Char à la mort d'Albert Camus (1960) dans un accident de voiture, la nuit.

L'Eternité à Lourmarin


Il n'y a plus de ligne droite ni de route éclairée
... avec un être qui nous a quittés. Où s'étourdit
notre affection? Cerne après cerne, s'il approche
c'est pour aussitôt s'enfouir. Son visage parfois
vient s'appliquer contre le nôtre, ne produi-
sant qu'un éclair glacé. Le jour qui allongeait
le bonheur entre lui et nous n'est nulle part
Toutes les parties- presqu'excessives -d'une
présence se sont tout à coup disloquées. Routine
de notre vigilance...Pourtant cet être supprimé
se tient dans quelquechose de rigide, de désert,
d'essentiel en nous, où nos millénaires ensemble
font juste l'épaisseur d'une paupière tirée.
Avec celui que nous aimons, nous avons cessé
de parler, et ce n'est pas le silence. Qu'en est-
il alors? Nous savons ou croyons savoir. Mais
seulement quand le passé qui signifie s'ouvre
pour lui livrer passage. Le voici à notre hauteur,
plus loin, devant.
A l'heure de nouveau contenue où nous question-
nons tout le poids d'énigme, soudain commence
la douleur, celle de compagnon à compagnon,
que l'archer, cette fois, ne transperce pas.


René CHAR




René Char















« La mort n'est qu'un sommeil entier et pur avec le signe plus qui le pilote et l'aide à fendre le flot du devenir. » 
Les matinaux - La parole en archipel,
René Char



Albert Camus


« Même ma mort me sera disputée. Et pourtant ce que je désire de plus profond aujourd'hui est une mort silencieuse, qui laisserait pacifiés ceux que j'aime. »  
Albert Camus  "Carnets" 1949-1959