mardi 30 décembre 2014
Nicolas le Riche, soirée exceptionnelle à l'Opéra Garnier ( 9 juillet 2014 )
photo zimbio.com
http://www.zimbio.com/pictures/xLR16HFKVCL/English+National+Ballet+Rehearsal/qmGQkWiNIIH/Nicolas+Le+Riche
Lors de sa soirée de départ, le 9 juillet à Garnier, le danseur étoile de l’Opéra a transmis avec brio le flambeau aux jeunes générations (lundi 29 décembre à 22h30 sur Arte)
Il arrive tel qu’en lui-même. Tranquille, impérial, sans ostentation. De cette extrême simplicité qui sied au vrai talent et à la virtuosité. Il ? Cet homme en pantalon et chemise noirs en train d’étirer des arabesques comme on se réveille le matin, c’est Nicolas Le Riche, danseur étoile de l’Opéra national de Paris et star internationale. Sauf que cette mise en jambes douce et sensuelle a introduit, mercredi 9 juillet, au Palais Garnier, à Paris, le spectacle d’adieux du danseur. A 42 ans, Nicolas Le Riche a atteint l’âge de la retraite. Et peu importent le talent et la puissance de l’interprète, il faut partir.
Nicolas Le Riche est une espèce rare. Pour preuve. C’est la première fois, dans le contexte de l’Opéra national de Paris, qu’il a pu monter une soirée comme il l’entendait et non, comme ses collègues, quitter la maison en interprétant un de ses ballets de prédilection. C’est dire le statut de Le Riche et sa stature. Il a ainsi conçu ce programme de luxe en « l’ouvrant à des amis » comme Guillaume Gallienne ou Mathieu Chedid, mais surtout avec un éventail de ballets sélectionnés sur le volet du bon goût et de son histoire personnelle de danseur.
La voie ouverte aux jeunes
En ouverture de cette soirée saluée par une trentaine de minutes d’applaudissements à tout rompre, un extrait des Forains, chorégraphié par Roland Petit, dans lequel Le Riche semble ouvrir la voie aux jeunes de l’école de danse de l’Opéra. Une belle manière de jeter une passerelle sur un parcours d’exception en servant de courroie de transmission aux nouvelles générations. « Ma présence dans cette maison a duré trente-quatre ans au total, précise-t-il. J’avais envie de regarder cette jeunesse les yeux dans les yeux, de m’en émerveiller en montrant combien ils travaillent déjà sur un accomplissement d’eux-mêmes. »
Deux fois choisi par Nicolas Le Riche, Roland Petit occupe une place de prédilection dans sa carrière. Le voir et revoir dans Le Jeune Homme et la mort (1946),pièce de choc exigeant une virtuosité affûtée au point de passer pour de la spontanéité, est toujours une révélation. L’interprétation d’un rôle au sens fort prend avec lui une évidence aiguisée : appropriation d’une écriture et respect de l’œuvre étroitement mêlés.
Des ballets de format court
Avec finesse, Nicolas Le Riche a réussi à éviter l’enfilage d’extraits, façon collier de perles, grâce à l’articulation esthétique forte des différentes pièces. Une séquence d’Appartement (2000), chorégraphié par le Suédois Mats Ek, avec lequel il a souvent collaboré, interprété en duo avec Sylvie Guillem, emporte le morceau par sa concision dramaturgique. Certains ballets, de formats courts, comme L’Après-midi d’un faune (1912), de Vaslav Nijinski, et évidemment Boléro, de Maurice Béjart, permettent de déjouer le piège du « best of » en offrant le tour d’une œuvre. Et quels monuments que ces deux pièces historiques !
C’est dans Boléro, en 2008,que Le Riche avait fait se lever comme un seul homme les 2 700 personnes de l’Opéra Bastille, faisant fonctionner à plein l’effet catharsis sans jamais enfoncer la pédale de l’appel au public. « J’aime que, sur le plateau, on assiste à une sorte de naissance théâtrale, racontait-il à propos de cette pièce en 2010. La beauté de la scène réside dans la révélation intime qu’elle permet. A une condition : que l’acteur ou le danseur y soit pour ça, pour aller jusqu’au bout de cet exercice de dévoilement. Pas question de se cacher le plaisir immense d’être sur un plateau. Je ne supporte pas les danseurs qui s’excusent presque de leur présence. »
Et il est là Nicolas, entouré serré par la troupe et quelques-uns de ses amis danseurs étoiles comme Karl Paquette et Joshua Hoffalt. « J’aime défendre la danse masculine et aussi cette compagnie qu’est le Ballet de l’Opéra, glisse-t-il. On parle souvent de la compétition des étoiles mais des amitiés existent aussi. »
Une troupe éphémère
C’est d’ailleurs avec quelques étoiles-amies, comme Isabelle Ciaravola et Eleonora Abbagnato, qu’il a monté une troupe éphémère et un spectacle intitulé Itinérances, dans lequel il danse aussi avec sa femme, la danseuse étoile de l’Opéra de Paris Clairemarie Osta. Itinérances a tourné avec succès dans toute la France cette année. Parallèlement à cette production, toujours très concerné par la transmission, il a participé au remontage, en complicité avec la chorégraphe contemporaine et chercheuse Dominique Brun, de L’Après-midi d’un faune d’après la partition notée par Nijinski lui-même. En janvier, il va collaborer avec le Japonais Saburo Teshigawara pour l’opéra Solaris, à l’affiche en mars du Théâtre des Champs-Elysées, à Paris, et chorégraphie un nouveau ballet pour lui et Clairemarie Osta.
Le final de la soirée du 9 juillet a levé une tempête de papiers dorés sur la tête de Nicolas Le Riche. Lui, qui se sentait « comme une machine à laver émotionnelle » deux semaines auparavant, n’a pas craqué. « J’ai très bien vécu ce moment, j’étais simplement très heureux, confie-t-il. Parce qu’au-delà de moi, il célébrait cette maison qu’est l’Opéra sans aucune nostalgie. »
Rosita Boisseau
Journaliste au Monde
http://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2014/12/29/l-adieu-magistral-de-nicolas-le-riche_4546896_1655027.html
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
J'ai bien fait de l'enregistrer. Merci Nanouchka pour ce bel article-hommage
RépondreSupprimerBises
Cristian
J'ai regardé, c'était d'une beauté stupéfiante ! Un danseur et chorégraphe de grand talent, et la conception de cette soirée d'adieux à l'Opéra Garnier (qui lui revient), amicale et hors les normes en vigueur. Regarde Cristian, tu seras ébloui...enfin, je l'espère ! Bises
RépondreSupprimer