Le livre : AXION ESTI suivi de L'Arbre lucide et la quatorzième beauté - Poésie / Gallimard
Traduction de Xavier Bordes et Robert Longueville.
Préface (extrait)
Ores la lumière Et telle heure la première
….............................................................
A présent A présent le néant
et A Jamais l'univers, l'infime, l'insondable !
photo du Web (lien ci-dessous) |
Axion Esti
Axion Esti, titre qu'au cours du livre nous avons -sans audace-traduit par Loué Soit, est, avant Marie des Brumes et L'Arbre lucide et la quatorzième beauté, l'un des poèmes qui ont le plus fait pour la gloire d'Odysseas Elytis. En Grèce pour commencer, car c'est un livre conçu à partir de la guerre et de l'exil. Quand on veut se rendre à soi-même une patrie, mesurant mieux ce qui nous est cher à l'aune du manque, un livre-temple, un livre-cathédrale, sorte de sainte Sophie reconstituant et donnant la Grèce aux Grecs et au monde, nourri d'environ dix ans d'expériences difficiles, est le meilleur moyen pour un poète exilé de se reconstituer une patrie de mots.
Comme le reste de son œuvre, c'est aussi davantage : un bilan de l'homme contemporain(...)
Xavier Bordes
http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/1979/elytis-bio.html
A rebours
Courage : le ciel c'est ça
Et ses oiseaux nous
tous dont aucun ne se ressemble
Naufragée au fond de nous
Mer céréale avec terroirs et vastes bouveries
Seul au dehors subsiste l'hélianthe
Mais quel est celui-là qui marche en plein soleil
Noir et d'autant plus que forcit la lumière ?
Courage : l'homme c'est ça
L'Atroce qu'on eût appelé
pour un peu l'Albatros
Pures plaines de juin vents nomades
Brunes terres frayées que nous avons gravies
Altérés d'une infime étincelle de mont Thabor
Mais qu'est ceci qui tout bas vagabonde et frétille
Comme frisson qui nous viendrait d'un autre monde ?
Courage : la mort c'est ça
Dans le coquelicot épanoui
et dans la fine fine camomille.
Odysseas Elytis
L'Arbre lucide et la quatorzième beauté
Poésie / Gallimard p 203-204
trad Xavier Bordes et Robert Longueville
La genèse
ORES la lumière Et telle heure la première
qu'en l'argile encor
les lèvres modulent
à l'épreuve des choses de l'univers
Sang émeraude et bulbes en terre dorés
Charme suprême en son sommeil déferle aussi la
mer immense,
gazes de l'éther, ces voiles écrus
dessous les frondaisons des caroubiers et les grands jets
des palmiers drus
Là-bas tout seul j'ai rencontré
l'univers
sanglotant sans arrêt
Mon âme désemparée cherchait Héraut et Timonier
Lors j'ai vu je m'en souviens
les trois grandes Femmes Noires
en train de lever les bras en face de l'Orient
Leurs échines festonnées d'or et la nuée qu'elles
laissaient
peu à peu se ternissant
à droite Et des plantes
sous d'autres formes
Etaient le soleil avec son axe au centre de moi
tout d'un multiple rayon qui appelait Puis
celui que j'étais véritablement Le pur devancier des siècles
Le brin toujours vert dans le limbe ardent Le surgeon
non-coupé du ciel
Je l'ai senti venir et se pencher
au-dessus de mon berceau
telle au présent revient la mémoire vague
d'une voix qui empruntait aux forêts, aux vagues :
« Ta mission, a-t-il dit :
cet univers-ci
car il est tracé
au fond de tes entrailles
Instruis-toi et démène-toi
et bagarre-toi »dit-il
« A chacun selon ses armes »dit-il
Puis il a étendu les mains comme ferait
un jeune aspirant au titre de Dieu pour ensemble modeler
douleur et plaisir.
D'abord on a tiré à grand'force
jusqu'à ce que, du plus haut des créneaux
descellées, finissant
par tomber à terre les Sept Haches
c'en soit comme de la Tempête
lorsqu'elle est au point mort
où un oiseau répand
le parfum des recommencements
épuré le sang regagnait sa patrie
et les monstres peu à peu reprenaient figure humaine
Tant s'avère tangible
l'Incompréhensible
Par la suite les vents de ma famille sont tous arrivés aussi
l'avant-garde des galopins aux joues gonflées
nantis de ces larges queues virides qu'on voit aux Gorgones
et les autres les Anciens
les vieilles connaissances
la peau crustacée la barbe imposante
Et la nuée par eux fut divisée en deux Puis redivisée
en quatre
et le peu qu'il en restait ils ont soufflé dessus et
l'ont chassé vers le Nord
D'un pied puissant pénétra dans les eaux, et d'un air hautain
le grand Donjon
La ligne de l'horizon s'illumina
évidente mais dense mais infranchissable
EN SOMME
le premier des hymnes.
In, Axion Esti
opus cité – p 49 à 51
VI
Le POETE des brumes et des flots d'écume au fond
de moi sommeille !
Mamme de la tempête obscure entre ses lèvres d'encre
et son âme sans fin livrée aux ruées lascives de la
mer
qui vont grêler sur ses pieds-monts !
Déracinant même le chêne âpre s'abat le vent de
Thrace.
De tout petits voiliers en contournant le cap
soudain claquent au vent et s'éclipsent.
Puis reparaissent là-haut dans les nuages
de l'autre côté du gouffre amer.
Aux diamants des ancres il s'est collé des algues
barbes de saints mélancoliques.
De splendides rayons issus de leur face
font vibrer la rade éblouie.
A jeun, par ici se tournent les yeux vides des vieillards
Tandis que les femmes profilent leurs silhouettes
noires sur la chaux immaculée.
Au milieu d'eux moi, j'active ma main
Poète des brumes et des flots d'écume !
Dans l'humble boîte de couleurs je trempe bien
ma brosse au milieu d'eux et puis je peins :
Récemment en chantier
les ors fauves et les noirs des saintes Icônes !
Aidez-nous protégez-nous saint Canaris !
Aidez-nous protégez-nous saint Miaoulis !
Aidez-nous protégez-nous sainte Manto !
In, La Passion (Axion Esti)
opus cité - p 98-99
Petite mer verte
Joli brin de mer si verte à treize ans
Je voudrais de toi faire mon enfant
T'envoyer à l'école en Ionie
Approfondir absinthe et mandarine
Joli brin de mer si verte à treize ans
A la tourelle du phare à midi tapant
Tu ferais tourner le soleil en sorte d'entendre
Comme le destin s'agence et comment
Savent encor l'art d'entre eux se comprendre
De crête en crête nos lointains parents
Qui telles des statues résistent au vent
Joli brin de mer si verte à treize ans
Avec ton col blanc et tes longs rubans
Tu rentrerais par la fenêtre à Smyrne
Me calquer au plafond ce qui l'enlumine
Reflets de Glorias Kyrie Matines
Puis un peu la Bise un peu le Levant
Vague à vague retournant au loin
Joli brin de mer si verte à treize ans
Nous irions dormir hors la loi tous deux
Pour que je découvre au fond de ton sein
Eclats de granite les propos des Dieux
Eclats de granit les fragments d'Héraclite.
In, L'Arbre lucide et la quatorzième beauté
opus cité – p 189
Biographie d'Odysseas Elytis
Odysséas Elytis (en grec Οδυσσέας Ελύτης), nom de plume d’Odysséas Alepoudhéllis (Οδυσσέας Αλεπουδέλλης), est un poète grec né le 2 novembre 1911 à Héraklion et mort le 18 mars 1996 à Athènes.
Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1979.
Il était proche des poètes surréalistes français et de peintres comme Picasso et Matisse qui ont illustré certaines de ses œuvres. Ami de René Char et d'Albert Camus dont il a partagé la pensée de midi1 sur le primat accordé aux sensations et au culte de l'harmonie de la nature contre tout absolutisme historique, il fut aussi en France et en Grèce l'ami de son compatriote Tériade.
Auteur du grand poème Axion esti, hymne à la Création qui exalte la lutte héroïque des Grecs en faveur de la liberté, il fut aussi critique d'art, et s'attacha à créer des collages dans lesquels s'exprime sa conception de l'unité de l'héritage grec, par la synthèse de la Grèce antique, de l'Empire byzantin et de la Grèce néo-hellénique. Ses poèmes ont été mis en musique par deux des compositeurs grecs les plus célèbres du xxe siècle, Míkis Theodorákis et Mános Hadjidákis. D'autres ont été popularisés en France par Angélique Ionatos.
(Souce Wikipedia )
La gloire du Prix Nobel (1979-1987)
Le 18 octobre 1979, le prix Nobel de littérature est attribué à Elytis, avec la mention suivante : « Pour sa poésie qui, sur le fond de la tradition grecque, dépeint avec une force sensuelle et une clarté intellectuelle, le combat de l'homme moderne pour la liberté et la créativité. » Le 8 décembre 1979, le nouveau lauréat prononce en français son discours de réception du Prix Nobel ; il reçoit des mains du roi Charles XVI Gustave de Suède la médaille et le diplôme Nobel, qui sont légués, en 1980, au Musée Benaki à Athènes. Le 10 décembre suivant, au cours du Banquet Nobel, il prononce une allocution de remerciement, comparant « le voyage d'Ulysse dont il lui a été donné de porter le nom » à sa propre aventure poétique : « En me consacrant, à mon tour, pendant plus de quarante ans, à la poésie, je n'ai rien fait d'autre. Je parcours des mers fabuleuses, je m'instruis en diverses haltes ».
( Source Wikipedia)
La conception poétique d’Elytis
« Je considère la poésie comme une source d’innocence emplie de forces révolutionnaires. Ma mission est de concentrer ces forces sur un monde que ne peut admettre ma conscience, de telle manière qu’au moyen de métamorphoses successives, je porte ce monde à l’exacte harmonie de mes rêves. Je me réfère à une sorte de magie moderne dont la mécanique nous conduit à la découverte de notre vérité profonde. C’est pourquoi je crois, par idéalisme, que j’évolue vers une direction encore jamais atteinte. Espérant obtenir une liberté délivrée de toute contrainte, et une justice qui puisse être confondue avec la lumière absolue, je suis un idolâtre, qui sans le vouloir, parvient à la sainteté.» Athènes, 27 mars 1972.
Et Elytis procède bien par métamorphoses, par analogies de lumière. Lui qu’on a facilement catalogué enfant du surréalisme français et de la Grèce Antique s’est toujours défendu de cela, le mariage entre l’influence de la mer Égée et de Paul Eluard et André Breton.
Le poète s’en défend. Il s’en est longuement expliqué.
« On dit de moi que je suis un poète dionysiaque, surtout à mes débuts. Je ne le pense pas. Je suis pour la clarté. Comme je l’ai écrit dans un de mes poèmes « je me suis vendu tout entier pour la clarté. Je suis critique envers le rationalisme occidental, sceptique sur son classicisme, et je ressens la brèche ouverte par le surréalisme comme une véritable libération des émotions et de l’imagination. Pouvez-vous concevoir un nouveau classicisme dans l’esprit du surréalisme. Je n’ai jamais été un disciple de l’école surréaliste. J’ai simplement certains éléments congénitaux pour moi à la lumière grecque. L’occident trouve les mystères dans l’obscurité, nous les Grecs nous les trouvons dans la lumière. ».
(Source Esprits nomades)
Angélique Ionatos parle d'Odysseas Elytis
Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1979.
Il était proche des poètes surréalistes français et de peintres comme Picasso et Matisse qui ont illustré certaines de ses œuvres. Ami de René Char et d'Albert Camus dont il a partagé la pensée de midi1 sur le primat accordé aux sensations et au culte de l'harmonie de la nature contre tout absolutisme historique, il fut aussi en France et en Grèce l'ami de son compatriote Tériade.
Auteur du grand poème Axion esti, hymne à la Création qui exalte la lutte héroïque des Grecs en faveur de la liberté, il fut aussi critique d'art, et s'attacha à créer des collages dans lesquels s'exprime sa conception de l'unité de l'héritage grec, par la synthèse de la Grèce antique, de l'Empire byzantin et de la Grèce néo-hellénique. Ses poèmes ont été mis en musique par deux des compositeurs grecs les plus célèbres du xxe siècle, Míkis Theodorákis et Mános Hadjidákis. D'autres ont été popularisés en France par Angélique Ionatos.
(Souce Wikipedia )
La gloire du Prix Nobel (1979-1987)
Le 18 octobre 1979, le prix Nobel de littérature est attribué à Elytis, avec la mention suivante : « Pour sa poésie qui, sur le fond de la tradition grecque, dépeint avec une force sensuelle et une clarté intellectuelle, le combat de l'homme moderne pour la liberté et la créativité. » Le 8 décembre 1979, le nouveau lauréat prononce en français son discours de réception du Prix Nobel ; il reçoit des mains du roi Charles XVI Gustave de Suède la médaille et le diplôme Nobel, qui sont légués, en 1980, au Musée Benaki à Athènes. Le 10 décembre suivant, au cours du Banquet Nobel, il prononce une allocution de remerciement, comparant « le voyage d'Ulysse dont il lui a été donné de porter le nom » à sa propre aventure poétique : « En me consacrant, à mon tour, pendant plus de quarante ans, à la poésie, je n'ai rien fait d'autre. Je parcours des mers fabuleuses, je m'instruis en diverses haltes ».
( Source Wikipedia)
La conception poétique d’Elytis
« Je considère la poésie comme une source d’innocence emplie de forces révolutionnaires. Ma mission est de concentrer ces forces sur un monde que ne peut admettre ma conscience, de telle manière qu’au moyen de métamorphoses successives, je porte ce monde à l’exacte harmonie de mes rêves. Je me réfère à une sorte de magie moderne dont la mécanique nous conduit à la découverte de notre vérité profonde. C’est pourquoi je crois, par idéalisme, que j’évolue vers une direction encore jamais atteinte. Espérant obtenir une liberté délivrée de toute contrainte, et une justice qui puisse être confondue avec la lumière absolue, je suis un idolâtre, qui sans le vouloir, parvient à la sainteté.» Athènes, 27 mars 1972.
Et Elytis procède bien par métamorphoses, par analogies de lumière. Lui qu’on a facilement catalogué enfant du surréalisme français et de la Grèce Antique s’est toujours défendu de cela, le mariage entre l’influence de la mer Égée et de Paul Eluard et André Breton.
Le poète s’en défend. Il s’en est longuement expliqué.
« On dit de moi que je suis un poète dionysiaque, surtout à mes débuts. Je ne le pense pas. Je suis pour la clarté. Comme je l’ai écrit dans un de mes poèmes « je me suis vendu tout entier pour la clarté. Je suis critique envers le rationalisme occidental, sceptique sur son classicisme, et je ressens la brèche ouverte par le surréalisme comme une véritable libération des émotions et de l’imagination. Pouvez-vous concevoir un nouveau classicisme dans l’esprit du surréalisme. Je n’ai jamais été un disciple de l’école surréaliste. J’ai simplement certains éléments congénitaux pour moi à la lumière grecque. L’occident trouve les mystères dans l’obscurité, nous les Grecs nous les trouvons dans la lumière. ».
(Source Esprits nomades)
Angélique Ionatos parle d'Odysseas Elytis
odysseus elytis par angélique ionatos par chiranne
Liens vers sites consacrés à Odysseas Elytis
http://fr.wikipedia.org/wiki/Odyss%C3%A9as_El%C3%BDtis
http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/elytis.html
http://dornac.eklablog.com/odysseas-elytis-c21210316
http://www.volkovitch.com/F02_57.htm
http://www.poetryfoundation.org/bio/odysseus-elytis
http://angelique-ionatos.com/odysseus-elytis/
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