jeudi 25 septembre 2014

Pablo Neruda, Sonnet XVII






Je ne t'aime pas comme si tu étais rose de sel, de topaze,
Ou la flèche d'œillets qui propagent le feu,
Je t'aime comme l'on aime certaines choses obscures
Secrètement : entre l'ombre et l'âme.

Je t'aime comme une plante qui ne fleurit pas et qui porte
En soi, cachée, la lumière de ses fleurs
Et grâce à ton amour, dans mon corps vit obscur
L'arôme et concentré venu de la terre.

Je t'aime sans savoir comment, ni quand, ni où
Je t'aime d'un amour discret et sans orgueil :
Je t'aime ainsi car je ne sais pas comment aimer autrement

Si ce n'est cette façon dans laquelle je ne suis ni tu es
Si proches, que ta main sur ma poitrine est mienne
Si proches que lorsque tes yeux se ferment à mes rêves.

Pablo Neruda
in, La centaine d'amour

© traduction Pierre Clavilier


                                *****



No te amo como si fueras rosa de sal, topacio
o flecha de claveles que propagan el fuego:
te amo como se aman ciertas cosas oscuras,
secretamente, entre la sombra y el alma.
Te amo como la planta que no florece y lleva
dentro de sí, escondida, la luz de aquellas flores,
y gracias a tu amor vive oscuro en mi cuerpo
el apretado aroma que ascendió de la tierra.
Te amo sin saber cómo, ni cuándo, ni de dónde,
te amo directamente sin problemas ni orgullo:
así te amo porque no sé amar de otra manera,
sino así de este modo en que no soy ni eres,
tan cerca que tu mano sobre mi pecho es mía,
tan cerca que se cierran tus ojos con mi sueño.

crédit photo FR

1 commentaire:

  1. Cruelle question, si bien exprimée par Neruda, que celle de savoir comment aimer, si on aime comme il le faut à l'aune du vrai sentiment au plus profond de soi. Pas sur que la réponse que se donne Neruda sans nous la livrer n'est pas tout autant cruelle.
    Cristian

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