samedi 14 janvier 2017

Violences et balbutiements, de Françoise Ruban







Le silence même n'est plus à toi     
Giorgos Seferis
(c'est aussi le titre choisi par Asli Erdogan pour son dernier livre, Actes Sud- 2016)                                           



Violences et balbutiements


Dénudés les bras maigres du pêcher
ploient sous la bise de l'hiver
Cristallines perlent des larmes de pluie
Les mots se sont tus  __   trop longtemps
Si souvent le monde fait irruption
en mon cœur blessé


A Istanbul une Femme emprisonnée
Femme écrivain dont la plume est empêchée
Ses sœurs ses frères en écriture condamnés
A Berlin en Irak en Syrie...
     ___  de fanatiques assassins continuent les carnages de
Paris Nice Bruxelles Tunis Kaboul...
au nom de quels dieux inventés


Plus près de moi
Un ami pleure son amour perdu
Un autre courbe l'échine
   __  la terre nourricière refuse l'offrande des moissons
Un ami au cahier rouge retenu fouillé
à la frontière papiers confisqués retour reporté


Nos mots de pauvres mots des mots muets
Ciels fermés sous la cendre
L'Océan ne me fait plus frémir
La Beauté se tait  __   où chercher
Fatigue inespoir montent et brisent mes ailes
Douleur sourde à l'extérieur
si lourde à l'intérieur
A quoi bon quand tout s'en va


Toi
tu es là
jamais loin de moi
ici   ___   là-bas
ton souffle doux
ta lumière de baisers
tout près de moi
tu es là
Toi.


©fruban, le 12 janvier 2017



© crédit photos fruban




4 commentaires:

  1. C'est un texte bien écrit qui met bien en évidence le "à quoi bon". Et dont la réponse est "rien ne sert à rien". La vie dans ce monde de réalité, ce monde utopique, ce monde fait d'illusion est absolument inutile car dépourvue de sens et pour l'éternité. Mais c'est dans la nature humaine ne nourrir de l'espoir vain, car il sait intuitivement qu'au delà de la vie, il n'y a rien, absolument rien. Ce qui augmente son angoisse métaphysique alors que cela devrait le réjouir. "Seul l'instant présent a de l'importance" comme disent de brillantes intelligences pas moins apeurées car seul "l'instant présent" donne davantage l'idée que la vie est essentielle. Mais qu'en pense le mort ou le non-né? Nous n'avons donc d'importance que tant que nous sommes en vie par le regard qu'on jette sur les autres dans notre prison qui jettent sur nous le même regard qui nous donne l'illusion d'exister dans notre prison commune. Et rien, de ce fait, ni personne, n'a plus ou moins d'importance qu'un autre. Tout le monde est pareil. CR.

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    1. Merci cher Cristian de ta lecture et de tes mots ! Nous nous rejoignons sur certains points mais je pense être moins désillusionnée que toi.
      Oui, l'instant présent est essentiel à mes yeux, bien que je me sente le maillon d'une longue chaîne... Mes racines sont là et bien là. Et je continue à me projeter dans un à-venir, sinon quoi d'autre ?
      "Rien ne sert à rien" me dis-tu, je ne partage pas non plus cette affirmation catégorique, malgré une certaine noirceur dans mon poème. Il y a dans notre vie des périodes d'impuissance, de dégoût, d'envie de lâcher prise. Un texte n'est qu'un texte...un cri du coeur. Cri de colère, cri de tristesse, cri de douleur...parfois cri de joie. Juste des mots qui se taisent aussi, lorsque les faits et la réalité sont trop durs.
      J'aime profondément la Vie, j'aime les autres (comme je peux les haïr aussi),j'aime la Beauté...Oui, l'Amour de la vie me tient debout.
      Je suis trop bavarde...mais ne sommes-nous pas ici, dans les questions essentielles à l'être humain ?
      Encore merci à toi !

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  2. Ma chère Françoise, je ne sais que te dire. Je te comprends et je respecte bien évidemment ta position. Je n'entrerai pas dans une argumentation métaphysique et c'est pourquoi je résumerai ma pensée en disant ceci:
    La vie, me semble-t-il, n'a d'importance que pour les êtres vivants.
    Je t'embrasse
    Cristian

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  3. J'ai lu, j'ai aimé....
    Je t'ai imaginée marchant, côtoyant , des débris, des tas de cendres
    Je t'ai imaginée cherchant dans des rues vides, des visages et des mains tendues
    Je te vois parcourant le chaos des guerres sombres
    Je te vois encore te retournant
    Il y a en toi, cette volonté de dire au monde, arrêtez tout de suite vos absurdités !
    DT

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