lundi 7 août 2017

La chute de la philosophie, de Cristian Ronsmans




Cristian Ronsmans, cliché personnel



La chute de la philosophie

Où en est la philosophie en ce 21ème siècle où l’on n’a jamais tant vu de professeurs de philosophie consultés comme des philosophes, professeurs qui ont été et se sont allègrement médiatisés ?

Où sont les Sartre, Merleau-Ponty, Ricoeur, Lévinas, ou Heidegger et quelques autres. Que sont les philosophes devenus que j’avais de si près connus ?

Aujourd’hui le « philosophe » patenté est une sorte de chroniqueur du social, de l’événementiel, de l’anecdote. Il se concentre sur un aspect du paysage en oubliant tout le tableau. Pour mieux légitimer se qu’il considère comme son œuvre il pioche ici ou là en convoquant les philosophes du passé qu’il prend à témoin. Un marqueur de validité en quelque sorte.

Mais qu’en est-il de la poursuite de l’œuvre philosophique qui traite du fond gigantesque de la condition humaine ?

Pas grand-chose. Ils soulèvent biens quelques idées, mais les prennent aussitôt pour des concepts alors que ces « philosophes » se sont mutés en substituts des sociologues. Ces derniers souvent, de ce fait, croyant rendre la monnaie de la pièces philosophale, estiment qu’ils pensent en philosophes.

Première piste : En la fin récente du 20ème siècle toute conception métaphysique du monde s’est diluée dans une absence de plus en plus envahissante. On pourrait envisager une visibilité de plus en plus en perte de vitesse du public. Mais en même temps on argumentera sur le fait que faute de discours philosophique majeur sur la métaphysique, il ne faut point s’étonner de voir le maigre public, s’il en est, se dissoudre dans le néant.

Certes, et je ne mélange pas tout. Il reste encore des philosophes, ni professeurs, ni sociologues aux instruments, humanistes et moralisateurs aiguisés, philosophes de l’ombre, lesquels s’ils n’éditent pas clandestinement, sont des philosophes discrets. Je pense à des gens comme Marcel Gauchet, Alain Badiou et quelques autres.

Certes, je ne dénie pas la nécessité indispensable d’un enseignement philosophique qui est hélas aujourd’hui dans bon nombre de sociétés, discrédité, méprisé et marginalisé. Et ces professeurs ont bien du mérite.

Seulement voilà, deuxième piste de réflexion.
Aujourd’hui, ce n’est pas une grande révélation et chacun sait, pour en être même souvent victime, le médiatique l’emporte sur tout le reste et se complait à employer tous les instruments technologiques, sociologiques et d’éthiques de pointe mis à sa disposition pour mieux mettre à l’étiage le cours de la société.
C’est le nivellement par le bas en sanctifiant, divinisant l’Homme. L’Homme, centre de l’Univers Prométhée en personne s’en bouffe le foie, sans l’aide du moindre rapace. Jamais il n‘aurait imaginé l’explosion d’une telle hybris.

Voilà les raisons essentielles de la « disparition » des grands penseurs (Hegel, Husserl, Bergson, Sartre, Lévinas etc…) Qui ouvraient une voie vers une vision globale du monde qui font le tour du problème où l’Homme et l’Univers se rencontrent, où l’Univers et l’Homme se rencontrent.

La vision conceptuelle du monde (telle qu’envisagée par Emmanuel Kant à laquelle on préfère se délecter des paroles d’un autre Emmanuel) qui offrait les grandes synthèses théoriques qui ordonnaient la connaissance de Platon à Sartre semble éradiquée.

Les valeurs culturelles du 3ème millénaire sont encore à inventer. Il nous faut repenser la philosophie comme une science. Inventer une épistémologie qui permette l’unification des savoirs. C’est la nouvelle tâche, totalement inédite, suite à la rupture, du philosophe contemporain. Ainsi nous comblerons le chemin entre le sociologue au microscope et le philosophe au télescope. Pour l’heure nous sommes des nomades pour beaucoup désemparés, à moitié morts de faim et de soif, pour d’autres en quête incessante. Mais ce qui est sûr est que nous venons tous de Kaboul.

Cristian Ronsmans, le 6 août 2017

3 commentaires:

  1. Merci ma chère Sirène. J'ai cru que c'était pour anniversaire cette publication. Je précise pour ceux et celles qui liraient nos échanges que ce que je viens de dire est une "private joke".
    En tout cas merci ma chère Françoise. Ton cachalot Cristian

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    1. Ha ha Cristian, tu me fais rire ! Mais ce n'était pas pour un quelconque anniversaire, simplement la profondeur de ton texte qui a retenu mon attention. Mais peut-être qu'inconsciemment ce fut un cadeau d'anniversaire !!

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  2. Tu as en ce cas pris un peu d'avance. Pas comme moi. Bon, bref, passons! Je m'enfonce et aggrave mon cas (défi que je pensais impossible à relever)

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