dimanche 29 mars 2015

Chroniques de l'ère mortifère, de Frédéric Baal (suite)

photos choisies par Frédéric Baal







« Matchs de boxe. Combats truqués. N’atteindra pas le troisième round avant qu’il n’ait pu voir les étoiles. Challenger mis K.-O. à la deuxième reprise. Le tenant du titre en sera dépossédé une prochaine fois. Réunion du soir. Atmosphère moite. Esprits survoltés. Tumulte de paroles et de cris. Le boui-boui et la fureur. L’établissement admet les dames dressées pour la retape. Lancent discrètement des invitations galantes. Peuvent se flatter de compter parmi leurs clients de petites frappes crâneuses et des bookmakers un peu malhonnêtes. Jambes musclées contre biceps gonflés. Conteurs de fleurettes savent manier leur fleuret. Empressés auprès de charmeuses pressées d’en finir. Arrête ton baratin, mon salaud, baiseness avant tout. Au turf et au paddock, mon canasson. Et avec cela, encapuchonné pour la course. Dans la pénombre qui entoure les cercles de clarté que projettent sur le ring de grands abat-jour de cuivre, le bord de leur feutre rabattu sur leurs yeux, des managers sévères pour la qualité du travail. Enveloppés d’un manteau d’alpaga. Sortis en veste croisée à fines rayures. Gilet de velours. Chemise à col boutonné. Cravate en jersey de laine. Gants beurre-frais. Pantalon de flanelle blanche. Chaussures à semelles de crêpe. Commerce de galanterie sous haute surveillance. Gare à celle qui ne marchera pas droit. Babillage sans comptage n’est que ruine du parrainage. Livrées au tapin, envoyés au tapis, kif-kif boursicot. D’uppercut en hypercul, la vénalité est partout. Chambres meublées à l’étage. Affaire promptement conclue, affaire promptement vidée. Pas une minute à perdre. Excellentes techniciennes. Nombreuses épreuves à leur actif. Séances d’entraînement quotidien. Connaissent leur métier jusqu’au bout des lèvres. Combats en champ clos. Brefs, mais intenses. La scène pugilistique à baldaquin. Au finish. Jarretelles noires contre culottes blanches. Une maille de mon bas a filé sous la pression, les coutures de ton maillot ont craqué sous l’effort. Poids plume et poids coq. La soigneuse et le boxeur. Aux petits seins pour lui, aux petits soins pour elle. Ressorts de sommiers et de punching-balls gémissent de concert. Arrête ton cinéma, mon cochon, on n’est pas là pour badiner. Esquives élégantes et préliminaires abrégés, puis un crochet du droit. »
Extrait de Chronique de l'ère mortifère, Frédéric Baal, Editions de la Différence, Paris, 2014.


"Chronique de l'ère mortifère" est disponible en version papier et en version numérique sur tous les sites de vente de livres (Fnac, Amazon...).


















Toutes les photos ont été prises et /ou choisies par Frédéric Baal


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2 commentaires:

  1. Bel hommage à notre ami Frédéric Baal et en même temps, excellente évocation de cette chronique de l'ère mortifère avec sa présentation sous formes diverses. Merci Nanouchka. C.R..

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  2. Frédéric Baal est un écrivain que j'ai envie de faire connaître. Je le trouve original et talentueux.

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