lundi 30 mars 2015

Polyphonie Tunisie, collectif de poètes



Photo © AFP/FADEL SENNA


Polyphonie en hommage à la Tunisie et, par là-même, à toute âme meurtrie par la barbarie



Tunisie
La douceur de ton nom
s’éclipse dans le sang
De ta douceur je me souviens
de la blondeur des sables
des villes blanches
terres hospitalières
[mirages]
qu’êtes-vous devenues
la violence aveugle broie
qui attise nos désespoirs
terreur sans nom
qui tue
amis détruits
par le chagrin
Tunisie terre d’accueil
terre libre
ton visage de larmes
de feu de sang
ton nom sur mes lèvres
tremble
et ton sourire
au bord des cils
ta douleur est
la mienne
Tunisie
à mains tendues.



Angèle Paoli,
le 21 mars 2015


                                                        ******



Jour I




Dans la candeur splendide
d'une nuit encore inconnue,
je quitte ces terres meurtries
aux rives ambrées d'espoir
aux parfums noirs poudrés.
Et ma lèvre assoiffée,
et mes mains luxuriantes
en mon corps vont se taire Je
ne marcherai plus.


*

Des minarets aux camélias,
l'aube élève un chant
de désespoir sans cesse
renouvelé.


*

Dans nos yeux
glisse l'oubli,
oublié Toi qui t'immolais,
dévorés Vous corps explosés.


*

Les persiennes du service
chirurgie trient les
premiers rais solaires
sur les âmes engourdies.
Tu me demandes pardon
- est-ce toi, dieu ? -
car je l'ai trop aimé,
Lui humain je l'ai cru bon
et parfois un peu divin.


*

Tout semble neuf
et calme ici
dans l'abysse matinal.
Le feu intense et rouge,
le feu des
profondes heures
et le pâle passé.
Le lit d'hôpital
où gît mon corps
semble un radeau
qui sauve de l'horreur.


*

Et vers la mort
mes yeux, enlacés aux
majestueuses chutes
sur un lac qui scintille,
mes yeux ont des larmes
sans vengeance, et ces
larmes sont seules.

*

Martine Cros, contre la barbarie,
le 20 mars 2015



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TUNISIE MON ENFANCE



*


Où est le jasmin et ... la rose ?
Où sont les tapis de Kairouan ?
Où j'aimais tant me vautrer enfant
Où sont les orangers en fleur ?
Où sont ses mille parfums ?
mais voici le temps
Où les tapis sont maculés de sang
où le miel se mêle à la poussière
mes pieds nus
j'avance vers la douleur indicible
de ma terre d'Afrique
le regard se perd, vitreux
sur les espaces guerriers
de corps jonchés
disloqués
par tant de pensées de haine
portées
par les soldats de la honte !
Où est le jasmin ....
où est la rose ....
où est l'oranger en fleurs ….
Où est le Soleil paternel, protecteur ?
Où ?.....



Nataliah OSO
Le 20 mars 2015
Tous droits réservés

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Jour II



*



Trêve

*

Déplie toi dans
le ventre creux
friand des
brebis égarées
Régale toi du désert sous
leurs semelles libérées

*

La poussière de l’air
tremble et je m'assieds
Sur les accords
de Kamenja
je suspends l'attentat
juste une fois juste juste
juste une fois


*
Un seul ton cependant
tonne

*

Celui de la colère
de ces bouches en culs de sac
aux lèvres crispées si laides
de jugements derniers
faux diffamés prétextes
prétextes
prétextes abjects
Être tueur au
nom de dieu
dieu dieu dieu
dieu lui
n'a rien demandé

*

Tremblé muet
creshendo

*

Trêve

*

Je veux ton ventre creux, Trêve
Ta nef où brûle des cierges
fous de brûler pour rien ou
rien que pour eux eux
eux qui sont le rien le peuple
l'innocence un rien sacré

*

Trêve

*

Veux-tu me prendre pour
épouse Trève
chair de nos clairvoyances
toi qui nous ensorcelle
depuis mille parcelles de temps
et qui nous bénis
à la crue de tes larmes
où abonde
abonde
la paix intérieure

*

Trêve

*

Afin que nos exodes puissent enfin parler
l’enfance de nos lendemains

*


*

Martine Cros, contre la barbarie,
le 22 mars 2015


*



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"C’était à Mégara
faubourg de Carthage
dans les jardins d’Hamilcar" *

et Tanit sous la lune
voguait dans ses voiles

j’ai oublié de quoi était fait le jour
mais Tanit était là

elle dansait pieds nus
au rythme des cymbales

je me souviens
des vastes étendues
blêmes sous un ciel de craie
à perte d’horizon

Matmata
d’Ibn Khaldoun
chantait à mon oreille

je me souviens

des chambres troglodytes
de la blancheur vibrante des murs
des tapis colorés
des ksars de Tataouine
des greniers de pisé

le ksar Ouled Soultane
chantait à mon oreille
volutes du désert

et demain qu’en sera-t-il ?

qu’en sera-t-il demain
des rires colorés
au cœur de l’oasis
du chant du paysan
trottinant sur son âne
des enfants enjoués
livrés aux terrains vagues

demain ?
défunt le sourire des femmes !




*
  _* Gustave Flaubert, Salammbô_
*


Angèle Paoli,
Le 22 mars 2015


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Le monde sans lendemain



*


Je me souviens…
Je me souviens si bien.
J’avais mis ce jour là une robe lilas.
Relevé mes cheveux d’un joli ruban bleu.
Me demandant s’il remarquera
Que c’était aussi la couleur de mes yeux

Mes pas ne me portaient pas,
ils me soulevaient, me transportaient.
Je respirais et savourais le printemps
Que je humais comme on inspire un sentiment

A chaque mesure qui me menait vers lui
Mon bonheur filait en douce harmonie
Rien de ce qui se passait autour
N’aurait pu assombrir ce jour

Nous avions devant nous un futur serein
Des projets à n’en plus finir, des lendemains.
Quand j’y pense encore aujourd’hui
J’étais alors la plus heureuse des filles

Au détour de la rue, j’ai tout de suite su…
La fumée et les cris, les visages exsangues.
Je suis restée plantée là, hagarde et terrifiée
Les yeux fixés sur la terrasse du café

Près d’une table renversée, parmi les corps allongés
Il semblait endormi comme l’autre jour dans le pré.
Caresser ses cheveux soyeux, encore une fois
S’il vous plait, accordez-moi au moins cela…

Il n’y aura plus de demain
L’hivers l’a emporté
Ne laissant plus que chagrin
Et âme esseulée



Laurence Nicolas. 22/03/2015.
En hommage à la Tunisie meurtrie.
Tous droits réservés


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Ternie Tunis, l’héroïsme puis saigne Bardo
Aux décombres d'Irak, Nimrud
Au décompte des jours
La peur menace
Que tout se sache
Se taise
Ne
Laissons plus
Se
répandre
Tant de
N



*


Georges Thiéry,
Le 22-03-2015, hommage à la Tunisie blessée



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Jour III


*



le chaos sera.

pour que ne reste que la peau d'amour
cette peau d'aveu

le nu de l'être au monde
debout dans le vent

le vent
dont la rage balaie l'homicide de l'arbre

car le vent fait l'amour aux feuilles de soi
il en naît des diamants de lumière

car l'être s'abandonne au monde
dans le nu de l'aveu

des pleurs de joie dans sa bouche
qui regorge de songes

hantée mon âme

délecte-toi
de la cascade espérante

car nos peaux s'assèchent
et couvrent l'apocalypse

elle sera. et sur sa tombe
d'éthers insolites

nos baisers


*


Martine Cros,
le 23 mars 2015



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Disperser l'ombre lorsque
à Tunis
Pleurant la trêve
des libertés qui s 'écoulent comme un sang sur le marbre
à glacer d'horreur
Les lignes parfaites de la quiétude
Se lève le jour
Le thème
L'anathème
Le discours
Des parfaites indécisions du jour
Advenu qui trace une route
Un parallélépipède
Un angle saillant
Une pointe dans le cœur
D'un peuple partant à la conquête du juste
Une salve
Qui enterre
La loi de vie
Dans un puits
Un gouffre
Se relever
Un dernier défi
Et ces discours sécuritaires
Comme s'ils pouvaient faire taire l'arbitraire.



Georges Thiéry,
Le 23 mars 2015, hommage à la Tunisie blessée.



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Je voulais juste voir
l’envers des cratères

d’or

sous la lumière

le fond des coquilles

vides

au bord des rires

je voulais juste franchir
la haie cotonneuse
des nuages

boire

au creux des schistes
les lèvres de mousse

je voulais te dire creuse
creuse encore
sous les pores sous
l’écaille des ruisseaux

file à contre-courant des
images à contrevent du temps
qui glisse sous ta peau
os et chair muscles et rides
houles de vagues de sillons
qui obsèdent le silence

toi que rien ne retient

sinon la légèreté
funambule de l’air



Angèle Paoli,
Le 23 mars 2015



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Jour jour jour
Jour quatre jour
Jour quatre jour
Jour jour jour



*


Vénérer son visage
Ecouter ses yeux
Marcher perdre marcher
Marcher perdre marcher
Perdre haleine perdre langue
Se cacher fuir se cacher
Se cacher fuir se cacher
Fuir à mourir
Est ce qu'un peu de moi vivra en elle


*


Si
Je me souviens
Je voulais me blottir
Contre sa poitrine
Pour entendre son coeur
Parler à mi-mots
Puisqu'il faut
Se taire taire se taire
Se taire taire se taire
Et enterrer l'enfance
De l'Art
De l'homme l'homme
L'homme de l'homme l'homme


*


Femme toi irais tu tuer
Visage de mère
Pourrais tu mordre
Le sourire rire sourire
Sourire rire le sourire
Femme toi si je t'aime
Jusqu'à tes pieds prier
Que jamais tu ne
Meures meures meures
Meures meures demeures
Visage d'amante
Espère ton avènement



*


Espère espère espère
Espère  aime   espère
Espère  aime   espère
Espère espère espère





Martine Cros,
le 24 mars 2015



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Au Pays des cèdres


*



Ils sont partis , ils sont partis comme part le rêve
comme le bruit du vent dans les peupliers
qui s'évanouissent


Ils sont partis , je me souviens et je pleure
Ô rossignol blessé par les orties
Ô cimes enneigées de Sannine
Ô fleurs brisées , ils sont partis ...


Qui sait dans quelles montagnes
leurs navires se sont échoués
quel cavalier viendra me donner
de leurs nouvelles dans une veillée


Pendant que nous continuons les histoires oubliées
les oiseaux du printemps ont pris leurs envols
comme une aire de blés vide
comme des voix qui chantaient


Et se sont tues pour toujours
par une nuit sans fin
ils sont partis , ils sont partis , partis ...




Pascal Kin,
Le 24 mars 2015



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Résister

se donne à vivre
dans la rencontre des voix autres

convocation du corps
de l’esprit
des mots
de ce tout qui fait l’un

du vivre avec
ensemble

chacun porte en lui
la présence de l’autre
et l’un est la marque de tous

persister / résister
rythme la force
qui nous tient
rivés à la cadence

celle qui unit
et fusionne dans l’un

Il faudrait que le poème dise
ce qui obsède tient à la bride
convoque dans la cruauté

Hommes enchaînés
à l’obscène violence

écrasement et pesanteur
chacun tremble de son ombre
les langues s’enroulent dans le sang

est-il loin encore
le jour où s’insurger
prendra le relais de l’absence

où la révolte
clouera l’abjection
en son centre

en non-silence !



Angèle Paoli,
le 24 mars 2015


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*


Jour dernier


*


Je ___ Tu Ils ___

tombe à
genou
tombe des nues
garde à Vous
nues dans l’Oural
en revue
dans ce sang caravanal


*



Nous ___

paraboles disséquées
que nous sommes
à tomber par terre
unies ___ mortes


*



Elle ___

un Tout pendu au fil d’Ariane ___
d’où ?
suspendue à nos lèvres labyrinthiques
une demande de ___ pardon ___
et nous inflige l'inosé


*



je crée avant mes pas ton visage
et la danse des fous

je danse ou presque ce naufrage
infidèle et ce monde imparfait

qui s'emparera du dernier radeau
marqué au fer des symboles


*



Je ___Tu ___Ils
je te prie
de les écrire
au cas où
demain nous meure



Martine Cros,
- le 5 décembre 2010 et -  le 25 mars 2015



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LUNE FÉCONDE

*


Je m’en suis pris à Dieu
Je m’en suis pris aux hommes
Condamné autant les cieux
Que les contestables dogmes

Je me suis réfugiée dans la terre
Comme le plus insignifiant des vers
A la recherche d’une raison
En pleine confusion

J’ai échoué sur les rivages
Après ce déluge, un naufrage.
Vidée de cette substance
Qui me protégeait de l’errance .

Et puis, j’ai levé mes yeux embués
Je t’ai vu dans cette immensité
Tellement évidente de beauté
Que j’en étais dés lors aveuglée

Face cachée et demi mondaine
Parfois timide, à d’autres hautaine
Tu veillais sur les êtres de ta blancheur lactée
Et réveillait l’âme des poètes égarés

Avidement je te peignais
De toutes les couleurs de ton aura
Sereinement je te dépeignais
Du débit que mes mots créa

J’avais enfin compris.
Face au mal, à ceux dénués de coeur,
Pour qui j’avais le plus grand des mépris,
J’opposerais la beauté, la douceur

Lune, tu es le plus magnifique des tableaux
Celui que l’on ne pourra jamais détruire
Vivante, vivifiante, éternelle là haut
Pour toi, ma volonté de créer, de ne pas nuire.



Laurence Nicolas. 24 Mars 2015.
En hommage à la Tunisie,

Contre ceux qui pensent détruire les âmes
En nuisant aux Arts et aux cultures.



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COPEAUX A BARDO(S)...


*


…autant de morts sont vivants dans une seule pierre sculptée –autant de mains tendues pour une révolte qui élève– que dans la mémoire de tous les Hommes rassemblés –tous des singuliers du vivant car il n’y a pas de commun des mortels– autour de la pierre pour marquer au burin –le moindre coup résonne de toutes les langues qu’il faut pour faire parler la terre– tout ce peuple debout qu’il y a en chacun –qui déborde toujours puisque solitude n’est que conscience des autres– qui depuis toujours croit en l’Art comme en Dieu –juste après l’invention des paupières l’Homme décida lui-même de ce qui l’obscurcirait– pour assurer ses avants et faire un pas de plus au risque de tomber dans les lueurs du jour –la lumière c’est terrible on n’ y voit pas l’obscur– autant de vivants sont morts par une seule balle bien lisse…


**


…marcher jusqu’au bout du crâne
tout en lèvres
jamais rien jamais tout
sonner juste juste pour sonner
l’Art
à cloche-langue sans peine
sur un pied pour
juste rester debout…



Jean-Claude Goiri,
le 24 mars 2015



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COPEAUX A BARDO(S)…II

*



…ils font place nette pour inoculer le regard –celui qui n’a qu’un œil ne voit pas le relief– où le rien est une arme à rabaisser la masse –elle ne fait que la moitié du geste l’autre part est pour ceux-là qui la mènent– lui enlever tout passé tout espoir de pourvoir au jour –comme un drapeau le jour tenu par une seule main– où le vide est si plein que l’art est nécessaire –puisque l’art c’est l’autre où chacun se voit– à se construire un être où tout un peuple se reflète –juste avant l’apparition des miroirs l’Homme se reflétait dans l’eau claire et mouvante– juste avant de se dire qu’il faut créer une place où le regard se débrouille…

**

…au poids des mots au jugé
l'illusion humaine est si forte
que j'ai fini par y croire
au poids des mots
de l’humain
qui tire à vue sans y croire
à l’humain
du poids des mots

démonstration

du poids des armes sur les Hommes les choses
d’une vérité qu’ils détiennent
levant le poème religieux
le croire et le pouvoir sont si lourds
que ce sont les seuls poings qu’ils tiennent
mais en face
d’autres poings s’élèvent pour dire
la poésie n'est pas l'acte d'énoncer une vérité
mais plutôt celui d'en supposer plusieurs…




Jean-Claude Goiri, le 25 mars 2015



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*


Cercle de fiel incandescent
au bord des lèvres
au bout des mots
la haine envenime le monde

combien de temps encore
tuer massacrer éradiquer
décimeront la terre ?

la peur au ventre
plein cœur
jusques à quand

cercle de fiel enfermement
larmes de sang supplices
l’homme par l’homme
meurtri avec acharnement

fusils à bout portant
crachent leur sève maligne
la vie a pris visage
de l’horreur

la bouche hideuse de la mort
arrache extirpe crève
pleurs et gémissements
râles humeurs et os

quand ― ose une voix
au-dessus du tumulte ―
cesserons-nous d’abreuver
le monstre jamais repu

de colère de fiel
de feu et de cris
d’injures de crachats
de flammes et de sang

dressé dans sa folie aveugle
l’homme contre l’homme
jusques à quand

est-ce vivre que d’assister
sans fléchir à la marée acerbe
de la violence
emportée dans sa trajectoire
de mort

est-ce vivre que haïr ?



Angèle Paoli,
Le 25 mars 2015


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Mon sang se glace


*



Mon sang se glace
En quelques blocs taillés
de rouge se teinte

Mon humeur
se fige
comme la pierre dans les soubassements de la ruine

Un son , puis un autre
des bruits de balle
qui résonnent, s’amplifient
comme une vague tueuse

Des coups à un visage
comme une faille dans l'air
transperce le rayon de soleil

Hier je n'ai pas voulu
et aujourd'hui je ne peux pas

Je risque le silence
de peur que mes mots blessent

Je risque la couleur
mon pinceau glisse
et s'étend dans un univers gris

noir

de principes morcelés, déchiquetés

Et d'un coup mon sang se déglace ...

Je crie

Je crie jusqu'à n'en plus pouvoir

Jusqu'à ce que ma peau en tremble

Jusqu'à sentir la sueur lymphique
couler sur les ossements
mis en lumière ….

Jusqu'à à en mourir....




© OSO 26 mars 2015

Nataliah Oso



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*


COPEAUX A BARDO(S)…III



*


…l’inculture se cultive en perçant la rétine –avec une balle c’est mieux sur le mur le sang dérange mieux les fleurs de la tapisserie– de tout un peuple adossé à ses grands murs porteurs –il faut voir comme ils tiennent depuis la nuit des temps– qu’il dressa de ses mains les doigts dans les cheveux –les cheveux les mots récupèrent tout de l’Homme l’incertain le sûr le nocif le tangible– pour démêler l’étincelle qu’il voyait dans le noir– l’obscurité est terrible car on y voit la moindre lumière– et en sculpter le bruit pour comprendre un peu tout –traverses plaintes briques tout lui sert de support– c’est que l’art lui promet qu’il n’est pas seul au monde –les oiseaux chantent bien avant l’aube car sinon le jour ne se lèverait jamais – qu’il attend le regard de celui qui attend peut-être en plein jour mais souvent dans la nuit –la nuit est faite de larges rétines suspendues aux lèvres du monde– quand s’enflamme soudain l’artefact l’esprit –qui n’a pas de limites ce sont les choses qui en ont– se construit des collines pour pouvoir y grimper –c’est l’ascension qui compte ce n’est pas le sommet– s’éloignant ainsi de la terreur des plaines où dans le plat règnent à l’aveugle les rétines de ceux-là qui cultivent l’inculture…


**

…punir entièrement
de la tête aux pieds toujours punir
celui qui écoute celui qui voit
celui qui sait que l’Art c’est
la brillant de l’enfant cheminant dans le noir
sculptant ses idées aux coups d’œil qu’il noue

punir entièrement
de la tête aux pieds toujours punir
à paroles tordues tout un corps se dénoue
de tout
aux gestes complexes ses armes se nouent
d’un rien
pas de naître en tête ni d’images de nous
à se demander même si un jour vraiment
son corps est passé par les lèvres du monde…



Jean-Claude Goiri, le 26 mars 2015



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ATTENTAT ****


*


attentat

ce n'est même pas un nom
s'ils en avaient un ou s'ils n'en avaient pas
si je dis oui ou si je dis non
c'est bien trop tôt et bien trop tard

plus rien ne les nomme

la corde lisse autour du cou n'existe pas
ni le triangle de la lame
ni le billot ni la hache
ni les cailloux ni les chevaux qui n'écartèlent rien
ni la ciguë ni l'injection docile
ni le dernier fauteuil en tonnerre
ni coups de pied ni coups de poing
point de mur mitraillé

rien

rien de ceci ni de cela
même pas un jugement
même pas de colère ou de révolte partagée
même pas d'étendards
même pas un mot
même pas un regard

qu'un baptême tremblant qui déloge la vie



Chloé Charpentier
Le 24 mars 2015


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*



à travers la grille
de codes de conventions de prisons
de poisons pour l'esprit
de dieux ou de diables qui font corps
sur le grill de l'enfer

aller de travers
et tenter
de marcher droit
dans la brisure de verre qui déforme toutes choses

tous ces martèlements de mots
manient les armes
contre soi
et les magnent si bien
que même les blessures ne demeurent pas
qu'il ne reste qu'un épais brouillard
dans lequel on viole la vie

bourreau tu es
la première victime
que l'aveugle lumière a tuée



Chloé Charpentier,
Le 26 mars 2015



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*


Toute la journée
regarder passer les anges
dans le cadre laqué
où tout un paradis
mélange la palette chromatique

toute la journée
assis sur un banc
concentrer son regard sur un seul tableau
et plonger tellement en-dedans
qu'il semblerait qu'on y vive

toute la journée
réservée pour l'expérience
du pigment des formes des détails de poils du pinceau qui font
mouvement

toute la journée
peut-être d'autres

ont-ils couru d'une œuvre à l'autre
Et puis
en moins de cinq minutes

toute la vie s'éteint

les regards posés sur les toiles
ne voient plus
la bombe posée sur le sol

la mort
comme leurs yeux
est venue faire bombance.



Chloé Charpentier,
Le 26 mars 2015


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ENVOLÉE


*



Vous pensiez menez la danse. Ne savez-vous donc pas
Qu’en toute transhumance tout ce qui monte redescendra?
Que serait donc la femme si de malice elle n’était habillée
Il faut bien qu’elle se pâme par quelques pieds de nez!
Gardez donc l’Univers, je prends la Terre mère.
Enfant légitime de Gaïa, je la porte à bout de bras.
Après avoir connu les étoiles, les vents et les voiles
En myriades de particules, j’éclate comme une bulle.
Je deviens l’insolante rivière qui sillonne la nourricière
Je suis la consciencieuse fourmi dans l’infiniment petit
Qui laborieusement travaille sans relâche et sans faille.
Je suis la petite brindille qui se mêle au vent
Et qui le titille pour aiguiser ses tourments.
Je suis fille de la pluie dont les larmes de l’oubli
Parcourent les semis pour enfanter la vie.
Je serais le jour tandis que vous serez la nuit.
Les étoiles ne se rencontrent pas mais ce sont des divas.
Dis vague à l’âme, Ô Sésame, mais ne t’ouvre surtout pas
Car bien que mon envie soit toute particulière
Et de mes pieds nus parcourir la terre
Je ne tiens pas à ce qu’elle s’ouvre sur l’enfer
Seul lieu que nous ne voulons pas découvrir
Même si une étoile un jour se doit de mourir.


Laurence Nicolas. 27 Mars 2015


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Torture

Laissez-moi ...
laissez-moi …
laissez-moi vous dis-je !!!

vous ne comprenez pas ?

Je ne veux entendre
que le Silence

Le Silence …

plus de cri, sortant de ma voix brisée …

Le Silence ...

Entrer dans ma tête
et se repaître
d'un instant
d'un souffle

Laissez-moi !
Ne me brusquez pas !
Pas méchamment...
Pas brutalement !....

plus de sang séché sur mes mains écrasées ...

NON …..

je ne veux entendre
que le Silence...

Entendre mon souffle...
jusqu'à qu'il ne soit plus

Laissez - MOI !!!!!

plus de couteau dans mes entrailles …

Laissez - MOI !!!!!

MOI...
MOI...
MOI...

jusqu'à mon inexistence ! ….

Là...

plus qu'un instant ….

Là ...

Plus que le SILENCE …

Là...

Je ne suis plus rien...
Rien qu'une ombre...
survolant l'étendue
brûlante
du désert....

Me fondre...

Laissez-moi
me fondre
dans l'immensité
de l'Univers ….



© OSO 27 Mars 2015

Nataliah OSO


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Attends le dernier train ou le dernier métro ou le dernier taxi
la réponse à tout le bonheur peut-être dans l'étiolement des nuages qui se réverbèrent sur les carrelages
une poussée de fièvre et le souffle qu'il manque à l'audace de vivre
et là le tintement des cristaux de pluie dans la rosée du matin
pour toi la poignée de main chaleureuse qui dit « sois ici chez toi »
et le clignement d'yeux ahuris sur ton visage lui-même tant attendu
attends encore un peu
l'herbe fraîchement coupée qui caresse tes pieds nus
attends-les pour être aimé et pour aimer
attends ces visages connus par la seule race des hommes qui sonne au carillon de l'amour
attends ton père il est là
attends ton frère qui arrive
et attends
attends donc ta sœur et eux tes ancêtres
attends ta mère
attends ta
ta
attends ta... quoi... attends ta... attends...ta



Chloé Charpentier,
Le 27 mars 2015


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faiseurs-de-morts dieux-cimetières équarrisseurs-d'âme fraudeurs-du-paradis champignons-à-cœur crève-chagrin annonceurs-des-rubriques-nécrologiques abstinents-d'amour violents-disgraciés abcès-à-la-vie dents-cassées morsures-à-l'intelligence apprentis-démons griffeurs-de-peau poison-dans-l'eau Graal-alcoolisés idées-des-jours-de-pluie oublieurs-de-tendresse brutes-et-truands-sans-chapeau ennemis-des-petits-oiseaux bouffeurs-de-larmes avaleurs-d'acide-chlorhydrique alchimistes-de-la-bombe-hache cascadeurs-ratés éventreurs-de-printemps bousilleurs-de-tableaux fumistes-iconoclastes puis le reste avec mais ça n'a plus de sens ....
non...
ça n'a plus de sens ...



*


Chloé Charpentier,
Le 28 mars 2015


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*


Tornades



Chaos d'un monde fracassé
injustice oppression inégalité ________ en cascades
roulent les larmes
ricanent les financiers __________ arrogance
vers les paradis dorés évasion
Les vents de corruption s'abattent
sur les plus démunis
les sans travail
sans respect
sans abri
Tornade
Guerres assassines fratricides
des fous de Dieu
intégristes de la haine
Femmes emprisonnées lapidées décapitées _____ toujours
pour assouvir vos mâles superstitions
vos insatiables appétits de pouvoir
vos stupides interprétations de la Loi
vos frustrations imbéciles
Tornade
Terre de Palestine occupée écartelée
résolutions onusiennes bafouées violées _______ lettre morte
Ô Jérusalem tes extrémistes
plénipotentiaires ou suicidaires
chassent tout rêve de paix ___________ à jamais
et le sang balayé par les vents de haine
en flots noirs se répandsur les oliviers déracinés
sur les colombes foudroyées
Tornade
La Planète meurtrie ________ libère
les vents ravageurs les flots indomptés
soulève les éléments vengeurs
sur les terres craquelées des déserts
et en quelques instants de fureur ________ noire et rouge
balaie les maisons des hommes
les vies des hommes
dont il ne reste qu'amas de décombres ruines fumantes
odeurs pestilentielles
sous le glaive impitoyable de Gaïa ______ mater dolorosa
Tornade
Mon âme s'enflamme ______ puis
déboussolée se noie
de soubresauts en soubresauts
de mots de miel en silences d'amertume
de rires lumineux d'espérance
en nuits noires où _____ sans toi
mon coeur se perd
L'Amour est triste
nos vies misérables ______ fétus de paille
emportés demain
par la Mort
en
tornade




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© F.Ruban
Le 23 mai 2013

Poème extrait d'un recueil paru en octobre 2014, L'Âme des marées , éditions épingle à nourrice
Tous droits réservés. Protégé par copyright


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Poème offert  le 28/03/2015 par Françoise Ruban en soutien à cette polyphonie, merci!

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Quand pleurent les lendemains




Tu te souviens
les lendemains qui chantent ____ ton credo
rebelle militante
sous la bannière rouge la lutte finale
guerres dictatures pouvoir patronal
tu condamnas
Ho ho ho Ho Chi Minh
dans les rues maintes et maintes fois on te vit
scander crier chanter
les lendemains qui chantent
Ô Jérusalem
que de problèmes de dilemmes
tu me posas
déchirée épouvantée _____ Nuit et brouillard
la Shoah ___ Non
plus jamais ça
Et pourtant autour de ton cou le keffieh d'Arafat
tu portas
Ô Palestine deux peuples frères une seule terre
tu dis ____ Non
au Mur de la honte en Cisjordanie
défigurée exsangue meurtrie
Tu te souviens
t'être recueillie sur les ruines fumantes
rue Copernic rue Desrosiers
tête basse lèvres tremblantes
synagogues cimetières écoles ________ par la haine profanés
innocentes victimes de la barbarie
fous de dieu fous de puissance et de cruauté
Aujourd'hui en ces jours de mai
malgré la senteur des roses
fatiguée meurtrie les cheveux blanchis
tu entends ______ le ciel gronde
et rugit la bête immonde
"Anne ma soeur Anne ne vois-tu rien venir"
chante le poète
le Musée juif de Bruxelles devint votre cible
la terre ruissela rouge du sang répandu par les rues
En Europe _________ en France surtout
la peste brune déferle en vagues bleu marine
sur nos fragiles dunes
Ô jeunesse déboussolée en pleine tempête
ton ignorance allume cette déferlante
" la Beauté du diable" pour unique bagage
chantait Louis Aragon
Et toi mon ami
ce matin
devant le Musée juif de Bruxelles
seul tu te recueilles ______ loin
des foules aux appétits curieux
par la pensée tu m'y emmènes
je dépose une rose blanche
par des gouttes de sang vite salie
Je te dis
merci



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© F.Ruban
Le 26 mai 2014

Tous droits réservés
Protégé par copyright



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Poème offert  le 28/03/2015 par Françoise Ruban en soutien à cette polyphonie

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LA TRAHISON


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J'ai trahi l'enfant
qui venait à moi
lorsque je lui ai dit ne pleure pas ...

j'ai trahi cette matinée
lorsque j'ai souhaité le soleil pour l'illuminer

j'ai trahi la terre du verger
lorsque je lui ai dit que cette année
les fruits seront les plus dorés

j'ai trahi mon sang,
mon visage
et j'ai fait couler
mes larmes sur son visage

J'ai décousu la terre
et elle s'est déversée

j'ai trahi l'Amour,

Et j'ai fait la guerre …



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© OSO
Le 28 mars 2015

Nataliah OSO




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Je voudrais ajouter à cette Polyphonie Tunisie, organisée à l'initiative d'Angèle Paoli et de mon amie Martine Cros, avec la collaboration de poètes de talent d'une humanité profonde et sincère, une oeuvre d'un artiste ami dont j'apprécie les qualités picturales, photographiques, humaines, Michel Giliberti. Il est également poète, né en Tunisie où il passa son enfance et son adolescence. Actuellement il vit de nouveau là-bas, une grande partie de l'année.
F.Ruban









J'ai déjà présenté quelques-unes de ses oeuvres ici

1 commentaire:

  1. Merci chère Françoise, merci aux autres poètes. Vous avez su de vos réalités vécues sur place, réinventer la Tunisie de toujours, pourtant.
    M G

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